«Un nouveau départ» après la déception de Rio

Publié le 26 November 2016

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À une semaine de sa reprise internationale, Charline Van Snick évoque Rio, «un mauvais souvenir», mais aussi sa nouvelle catégorie et ses prochains défis.

Quatre mois après sa défaite au 2e tour des Jeux olympiques de Rio, Charline Van Snick reprendra la compétition dans une semaine au Grand Chelem de Tokyo. Une reprise qui marque le début d’un nouveau challenge pour la judoka liégeoise qui nous a reçus chez elle, dans la banlieue parisienne. Rencontre.

© EdA - Alan MARCHAL

« J’ai repris il y a un mois et demi, après m’être ressourcée en vacances. » © EdA – Alan MARCHAL

Charline Van Snick, comment vous sentez-vous à l’approche de votre grand retour en compétition?

Je me sens bien. J’ai repris les entraînements à la mi-octobre et les sensations reviennent peu à peu. Je suis prête pour entamer un nouveau cycle.

Les Jeux de Rio sont-ils encore présents dans votre esprit?

Ces JO constituent la plus grosse déception de ma carrière car tous les voyants étaient au vert. J’avais fait une bonne préparation et j’étais en forme: tout était réuni pour y faire quelque chose de grand. Je suis très déçue car je connais mon niveau et je sais que mon élimination précoce ne reflète pas ma valeur.

La pression n’était-elle pas trop forte sur vos épaules?

Non, je ne pense pas. Durant ma carrière, et surtout pendant ma suspension, j’ai appris à gérer la pression, qu’elle soit médiatique ou pas d’ailleurs. Aujourd’hui, tout ça ne m’atteint plus. Je sais désormais faire la part des choses. Et ça vaut aussi pour le public brésilien: ce n’est pas parce qu’il me huait sans cesse lorsque je combattais contre leur compatriote Sarah Menezes (la judoka qui l’a éliminée au 2e tour des Jeux, NDLR) que je vais leur faire porter le chapeau. Peut-être que ça a joué inconsciemment sur la façon dont la rencontre s’est déroulée mais leur animosité envers moi ne peut pas tout expliquer dans mon échec. Si j’ai été battue, c’est parce que je ne suis pas parvenue à prendre le meilleur sur Menezes, c’est tout.

Rio 2016 ne restera pas un bon souvenir…

Non, et pas seulement d’un point de vue sportif. L’organisation sur place n’était pas au point, c’était quasiment impossible de sortir du village olympique, le public brésilien était très mauvais… Même lorsque leur équipe est battue 0-12 par les hockeyeurs belges, ils parviennent à siffler les Red Lions. Bref, je n’ai pas aimé ces Jeux!

Dragin, son nouveau coach

C’est à un jeune retraité de la scène internationale que Charline Van Snick  a confié ses entraînements.

Charline Van Snick n’a pas seulement changé de catégorie de poids après les Jeux olympiques, elle a aussi changé d’entraîneur. C’est désormais Dimitri Dragin, un ancien international français, qui s’occupe de la Liégeoise.

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Dimitri Dragin a vécu les mêmes doutes que Charline Van Snick : « Dès qu’on accepte de changer de catégorie, on se sent plus libre. » © EdA – Alan MARCHAL

« Même si notre collaboration m’a permis de me relancer et de décrocher pas mal de médailles durant ces dernières années, j’ai ressenti le besoin de quitter Baptiste Leroy, explique Charline. Aujourd’hui, je travaille avec Dimitri Dragin. Entre nous, le feeling passe bien. C’est un judoka très technique, rapide et doué dans le jeu de jambes, ce qui est important pour surprendre ses adversaires durant un combat. Et puis, il comprend ce que je vis… » Et pour cause puisque lui aussi a changé de catégorie de poids durant sa carrière.

Passé des moins de 60 kg aux moins de 66 kg en 2010, l’ancien lauréat du Grand Chelem de Paris apporte toute son expérience à la double championne d’Europe. « Avec Charline, mon premier objectif a surtout été de la rassurer. C’était essentiel de lui faire comprendre qu’elle pourrait être aussi performante dans une autre catégorie que la sienne. Et dès qu’elle a accepté son nouveau challenge, tout a été plus facile. »

De son propre aveu, Dimitri Dragin, retraité depuis peu, endosse donc deux costumes à la fois, « celui de conseiller et celui de coach » : « Je ne suis pas encore totalement dans le rôle de l’entraîneur qui donne ses instructions. Pour l’instant, je propose de nouvelles choses à Charline et c’est elle qui voit ce qui lui convient le mieux. Dans ce cadre-là, sa participation au Grand Chelem de Tokyo doit lui permettre de trouver ses repères dans sa nouvelle caté. Il n’y a donc pas d’obligation de résultat pour l’instant. » Ce qui ne veut pas dire pour autant que le duo n’a pas d’objectif précis en tête.

« Mon planning a été élaboré afin d’arriver à 100 % pour l’Euro du mois d’avril », indique la judoka. D’ici là, elle enchaînera les compétitions mais ne cherchera pas à prendre plus de muscles : « Je ne veux pas retomber dans le cercle vicieux de la perte de poids. Je dois pouvoir compenser avec ma vitesse, ma technique et ma mobilité. D’où l’intérêt de faire confiance à Dimitri. » Un entraîneur véritablement sous le charme de sa protégée : « Charline est déjà une championne ! Croyez-moi, elle va vite intégrer le top mondial en moins de 52 kg. »

Est-ce que vous pensez déjà à Tokyo 2020?

Même si l’échéance est lointaine, ça reste dans un coin de ma tête. Mais avant ça, il y a d’autres événements qui occuperont mon esprit…

À commencer par le Grand Chelem de Tokyo. Comment abordez-vous ce premier tournoi international depuis les Jeux?

Ce sera une compétition très spéciale pour moi car j’ai décidé de changer de catégorie de poids. Je passe des moins de 48 kg aux moins de 52 kg. Dès lors, étant donné que j’ai repris le judo depuis peu de temps et que je suis loin d’être à 100%, mon principal objectif au Japon sera de m’adapter à ma nouvelle catégorie et voir ce que je peux améliorer dans les mois à venir afin de concurrencer les meilleures judokas à l’Euro (qui se déroule à la mi-avril, NDLR).

Pourquoi changez-vous de catégorie?

En priorité parce que mon corps ne me laisse plus trop le choix. Même si je n’ai jamais eu de gros problèmes pour faire le poids en prévision des grands rendez-vous, ce n’était pas toujours aussi facile dans d’autres tournois. Ça en devenait même dangereux à certains moments. Après Rio, j’ai donc décidé de changer de catégorie.

« Ce qu’Ilse Heylen et les autres peuvent penser, je m’en fiche »

« Dans l’année post-olympique ce sera relativement facile, mais à deux ans des JO de Tokyo (2020), quand les cadors des moins de 52 kg seront à leur meilleur niveau, ce ne sera pas une mince affaire pour Charline… » A l’image de cette mise en garde de la jeune retraitée Ilse Heylen, les commentaires suscités par son passage dans la catégorie supérieure passent mal auprès de Charline Van Snick.

« Personne n’a de jugement à émettre sur mes choix de carrière, fulmine la judoka liégeoise. Comment peut-on déjà juger de mon niveau alors que je n’ai pas encore repris la compétition ? »

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La Liégeoise n’avance pas tout à fait dans l’inconnu puisqu’elle s’entraînait déjà parfois avec des judokas du top en moins de 52 kg. © EdA – Alan MARCHAL

Aussi déterminée sur le tapis qu’en dehors, le sociétaire du Bushido Saive ne se met pourtant pas de pression inutile sur les épaules. « En compétition, de façon générale, je vise la performance plus que le résultat. Pendant les prochains mois, je me focaliserai donc surtout sur mon judo et la meilleure façon de m’adapter à ma nouvelle catégorie de poids. » Ce qui explique une rentrée assez chargée avec un mois de décembre très complet (Grand Chelem de Tokyo et stage) et un mois de février durant lequel elle enchaînera l’Open de Sofia, le Grand Chelem de Paris, le Grand Prix de Düsseldorf et plusieurs jours de stage.

« Mais je suis très motivée, assure Charline Van Snick qui aimait déjà bien aller chercher la confrontation à l’entraînement « avec des filles du top comme Majlinda Kelmendi (la championne olympique, NDLR) ou l’Allemande Mareen Kraeh ». Je compte bien montrer à tout le monde que j’ai aussi ma place chez les moins de 52 kg. Ça va me booster de me voir progresser petit à petit. Et peu importe le temps que je prendrai pour m’imposer. »

« Lorsque j’en aurai fini avec le haut niveau, je veux pouvoir me retourner et me dire que je suis fier de ce que j’ai accompli, sans avoir de regrets, poursuit la Parisienne d’adoption. C’est ce que j’ai toujours fait chez les moins de 48 kg, et c’est ce que je compte bien faire en moins de 52 kg. »

Cette décision était-elle facile à prendre?

Non, ça n’a pas été un choix facile. À vrai dire, c’est un changement que j’appréhendais un peu, qui me faisait même peur au début. J’y réfléchissais depuis quelques mois car je voulais être certaine de ne pas me tromper. Sauter dans l’inconnu n’est jamais évident mais mon choix est fait désormais.

Peut-on dire que vous entamez une nouvelle carrière?

Je préfère dire que j’entame un nouveau chapitre. Mais il est vrai que j’avais besoin de repartir sur de nouvelles bases. Personnellement, j’ai toujours aimé me fixer de gros challenges comme celui-ci pour avancer. Et souvent, ça me réussit plutôt bien. Bref, c’est un nouveau défi que je me lance et j’ai hâte de le relever!

© Alan MARCHAL

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