Championne olympique et… prof de fitness: «la deuxième vie» d’Ingrid Berghmans

Publié le 17 February 2017

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Après avoir fait des ravages sur les tapis du monde entier dans les années 80, cela fait bientôt 25 ans qu’Ingrid Berghmans prodigue ses conseils aux habitués de sa salle de fitness située à Liège. Rencontre.

Berghmans n’a pas changé depuis sa retraite sportive. © Belga

Les cheveux blonds en pagaille, la silhouette toujours aussi élancée et le legging définitivement chevillé au corps, Ingrid Berghmans (55 ans) n’a pas changé d’un pouce depuis qu’elle a pris sa retraite sportive, au début des années 90. Sans doute parce qu’elle continue d’enchaîner les heures dans sa salle de sport, à Liège.

En effet, depuis bientôt 25 ans, le plus beau palmarès féminin du sport belge gère une salle de fitness dans le centre de la Cité ardente: le Vital Club. «C’est ma deuxième vie, résume simplement l’ancienne championne olympique. Je fais presque tout ici: j’accueille les clients, je les conseille, je donne des cours,… Bref, je n’arrête pas.» Mais pas question pour l’ancienne judoka de s’en plaindre pour autant, elle dont la carrière internationale a été marquée par les sacrifices et les entraînements à la dur.

«Je me souviens très bien de mes jeunes années, lorsque je me donnais à fond dans le judo, sourit-elle. Rien n’était facile pour les judokas de ma génération. Dans mon cas, j’allais travailler le matin et parfois le soir pour financer mes entraînements. C’était très dur! Alors, dès que je montais sur le tapis, je donnais tout ce que j’avais.» Objectif? Faire aussi bien que les hommes dont Robert Van de Walle. «On m’a toujours dit qu’il fallait que je les suive lors des exercices. Donc, j’obéissais. Idem quand on était en stage… Comme Robert ne se reposait pas, je ne me reposais pas. On nous prenait déjà pour des fous à l’époque. Mais au final, je pense qu’on peut dire que ça a payé.» Avec un titre olympique, six sacres mondiaux et sept médailles d’or aux championnats d’Europe, impossible de contredire la Liégeoise d’adoption.

Je pense avoir fait une belle petite carrière, mais je reste assez discrète sur ça. C’est dans ma nature.

Aussi modeste sur sa carrière qu’elle n’était volontaire sur les tapis, Ingrid Berghmans refuse de sombrer dans une nostalgie facile. «Ce n’est pas trop mon genre, explique celle qui a interrompu sa carrière après une énième opération, au ménisque cette fois. J’ai adoré ma vie d’athlète mais c’est du passé aujourd’hui.» Tout comme le judo, qu’elle ne pratique plus qu’à de rares exceptions. «J’ai un club qui s’est installé juste en face de mon club de fitness, dans un bâtiment que je possède, mais je n’y donne que quelques cours de judo seulement. Pourquoi? Parce que je ressens des douleurs au genou notamment et que j’apprécie moyennement de ne pas pouvoir me donner à fond sur le tapis. Et puis, le temps me manque aussi… J’ai déjà tellement de boulot avec ma salle de fitness.» Un projet qu’elle avait lancé tout de suite après sa retraite sportive avec feu son mari, le judoka Marc Vallot.

Quand je vois un kimono, ça me démange toujours un peu. Mais je me suis calmée…

«C’est lui qui a imaginé ce concept, se souvient-elle. Comme j’ai trouvé que c’était un projet intéressant, je l’ai suivi, tout simplement. En plus, j’avais déjà une petite expérience du fitness puisque j’avais prêté ma voix et mon visage à un CD qui compilait des exercices d’aérobic, à la manière de Jane Fonda. Et en stage, il m’arrivait parfois que j’échauffe les autres judokas avec cette méthode quand ils avaient besoin de se changer les idées. Bref, j’y ai vite trouvé mon compte et j’ai enchaîné les formations à l’étranger. Depuis lors, je n’arrête plus.» Ce qui va bientôt faire 25 ans, «un bail quand on y pense».

Principalement motivée par l’envie de partager sa passion pour le sport, cette maman de deux enfants ne s’imagine plus travailler ailleurs. «Et pourtant, au début, lorsque j’ai arrêté la compétition, je me suis dit que je pouvais peut-être occuper un poste au sein de la Fédération belge, histoire de donner des conseils à des judokas de la nouvelle génération comme Ulla Werbrouck ou Gella Vandecaveye, se souvient Ingrid Berghmans. Mais non, on ne m’a rien proposé. Quasiment du jour au lendemain, on n’a plus voulu de moi. Aujourd’hui, ça n’a plus d’importance: je suis passé à autre chose et je ne le regrette pas.» Paroles de championne.

Une pionnière du judo

Sa victoire en finale des Jeux olympiques. © Belga

Descendue des tatamis il y a un peu plus de 27 ans, Ingrid Berghmans possède un des plus beaux palmarès du judo féminin.

Au-dessus du lot pendant les années 80, la Limbourgeoise – qui a débuté le judo à 9 ans à Bourg-Léopold – a accumulé les titres mondiaux et continentaux en -72 kg et en catégorie open. «Je préférais la catégorie open car c’était plus tactique, explique-t-elle. Il fallait constamment s’adapter à un nouveau profil de judoka. Chaque combat était différent.»

Considérée comme une des pionnères du judo grâce à l’or olympique décroché à Séoul (1988), l’octuple (!) «Sportive belge de l’année» garde encore un œil sur son sport de cœur.

«Quand je regarde une compétition actuelle, je suis toujours étonnée de voir le nombre de nationalités qui sont représentées sur les tapis, note-t-elle. A Rio, où j’étais invitée par le Comité olympique belge (COIB), j’ai encore vu combattre des Mongoliennes, des Argentines, des Kosovares,… Forcément, à mon époque, il n’y avait pas tout ça. Le judo s’est vraiment mondialisé aujourd’hui.»

Toujours «étonnée» par l’évolution des conditions de travail des judokas actuels – «Ils sont devenus très professionnels, avec de programmes et des structures bien plus clairs» – Ingrid Berghmans avoue être surtout impressionnée par un combattant: Teddy Riner. «C’est incroyable la façon dont il bouge malgré son poids et ses adversaires. Il danse sur le tapis. C’est ça l’esprit du judo.»

© Alan MARCHAL

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