Cellule, médailles et espoirs : Arakelyan en quête de papiers

Publié le 12 November 2016

Partagez cet article

Déjà champion de Belgique U21 en 2015, David Arakelyan a décroché, samedi dernier, son premier podium dans un championnat de Belgique seniors. Et pourtant, son bonheur est ailleurs…

© EdA - Alan MARCHAL

Arakelyan a décroché, samedi dernier, son premier podium dans un championnat de Belgique seniors. © EdA – Alan MARCHAL

C’est une médaille de bronze amplement méritée qui est venue récompenser les efforts de David Arakelyan, il y a une semaine, lors du National. Présent à tous les entraînements nationaux, le judoka hennuyer a décroché le bronze au terme d’une journée rondement menée.

Excepté une demi-finale compliquée contre Matthias Casse, le futur champion de Belgique, David Arakelyan (-81 kg) s’est arraché pour remporter sa petite finale. “Je retrouvais un judoka qui m’avait battu en quelques secondes une semaine plus tôt, se souvient le sociétaire du J.C. Deux Haine. Mais heureusement, ça s’est mieux passé pour moi cette fois-ci.”

Pour la première fois médaillé dans un championnat de Belgique seniors, le jeune homme, qui fêtera ses 21 ans au début du mois de décembre, vit pourtant cette performance avec beaucoup de retenue. “Pour moi, l’important n’est pas uniquement de décrocher le plus de médailles possibles, explique-t-il. Ce que je veux avant tout, c’est prendre du plaisir sur les tapis. Et puis, dans ma situation, l’essentiel est ailleurs…” Et pour cause, depuis huit ans désormais, il attend une réponse favorable à sa demande d’asile.

“Représenter la Belgique dans le monde”

© EdA - Alan MARCHAL

Le sociétaire des Deux Haine a été enfermé en cellule pendant plusieurs heures, quelques jours avant le National. © EdA – Alan MARCHAL

De nationalité arménienne, David Arakelyan est arrivé en Belgique à l’âge de 12 ans. “Mon papa est réfugié politique en Belgique depuis 13 ans, raconte le judoka. Toute ma famille est venue le rejoindre quelques années plus tard. Et depuis lors, on attend que la Belgique nous accorde un droit de séjour.”

Très bien intégrée – “Mon papa travaille, ma maman donne bénévolement des cours d’anglais et mes frères sont scolarisés”, assure l’ancien champion de Belgique U21 – la famille Arakelyan souhaite seulement vivre plus sereinement. “Pour l’instant, nous n’avons droit à rien, ou presque, explique David. On a vécu pendant sept ans dans le centre de réfugiés à Morlanwelz avant de pouvoir louer une maison à La Louvière. On ne se plaint pas de notre situation, mais on aimerait juste obtenir nos papiers.” Histoire de ne plus connaître la même mésaventure qu’il y a une grosse semaine.

En effet, quelques jours avant le championnat de Belgique, David Arakelyan a été arrêté par la police alors qu’il revenait d’un entraînement national avec d’autres judokas. Sans papiers, il a passé plusieurs heures derrière les verrous avant d’être finalement relâché “grâce à un fax de l’Office des étrangers”.

Soutenu par la Fédération francophone belge de judo (FFBJ) qui l’entraîne et le suit depuis de longues années, David Arakelyan n’envisage son avenir qu’en Belgique : “J’aimerais tellement pouvoir obtenir la nationalité belge pour représenter ce pays dans des compétitions internationales. Aujourd’hui, je suis limité aux championnats de Belgique et aux interclubs. Bien sur que je n’oublie pas mes origines arméniennes mais je sens Belge avant tout. J’ai grandi ici. Et ma vie est ici.”

“Je lui donnerais ma chemise”

Présent à tous les entraînements importants menés par la FFBJ, David Arakelyan fait partie de ces judokas qui sont régulièrement suivis par Cédric Taymans et Damiano Martinuzzi. Pour eux, aucun doute possible, “David est un mec en or”.

“On se cotoie beaucoup sur les tapis car il ne manque presque jamais un entraînement, explique le directeur technique de la Fédération francophone. Petit à petit, j’ai découvert un judoka avec un coeur énorme. Il se donne toujours à fond et il est toujours prêt à aider les autres. Cela a été encore le cas l’été dernier puisqu’il a servi de sparring-partner pour Toma Nikiforov avant qu’il ne remporte le bronze aux Mondiaux d’Astana. D’ailleurs, je n’hésite jamais à le citer en exemple devant les autres judokas car il ne se plaint jamais et il fait toujours un boulot extraordinaire.”

Même son de cloche du côté de Damiano Martinuzzi : “David n’est pas seulement un super judoka, c’est aussi un garçon très poli et reconnaissant. Il ne dit rien et ne demande rien à personne mais il fait son bout de chemin. C’est vraiment un belle personne. Je lui donnerais ma chemise. J’espère qu’il obtiendra rapidement ses papiers.”

© Alan MARCHAL

Partagez cet article

Back to Top